CI-Education nationale : un homme de média « se libère» sur la ministre Kandia !

« A notre temps, je dirais à votre temps, madame la ministre, les choses ne fonctionnaient pas comme ça. Moi-même, très tôt orphelin, je n'ai jamais pu acheter un livre au collège. Pourtant j'étais major dans plusieurs disciplines. Les professeurs ne faisaient pas du livre, une exigence.» (Sylvain Débailly, journaliste)

CI-Education nationale : un homme de média « se libère» sur la ministre Kandia !
Sylvain Débailly, journaliste ivoirien, à la ministre Kandia Camara : « Que prenne fin le mercantilisme scolaire !»

"Que prenne fin le mercantilisme scolaire !"

Mme la ministre, le gouvernement ivoirien fait depuis belle lurette la promotion de la gratuité de l'école. Je voudrais pour ma part vous dire, en ma qualité de parent d'élève, que je ne crois pas vraiment avec le contexte ivoirien et vu l'environnement dans lequel évolue notre école, à cette gratuité de l'école. L'école ne saurait être gratuite. C'est mon avis mais ce n'est pas cet aspect qui m'intéresse ici. Ce qui m'intéresse et que je viens dénoncer, c'est ce mercantilisme exacerbé, ce commerce éhonté qu'instaurent les responsables de nos écoles (du proviseur ou principal au professeur) dans les établissements qu'ils gèrent.

Mme la ministre, à Galébré dans mon village (disons dans ma ville), le collège moderne est devenu l'un de ces shoppings à ciel ouvert. Les enseignants, sans scrupule aucun se livrent là-bas à un commerce au grand dam des parents d'élèves et des élèves qui accumulent les mauvaises notes par manque d'argent pour répondre aux exigences des enseignants. Ma petite nièce m'a rapporté qu'elle n'a pas composé à la première interrogation d'anglais pour la simple raison qu'elle n'avait pas le livret d'activités en vente chez son professeur.

Informé de la situation, j'ai demandé à sa mère de se rendre à l'école pour prendre les renseignements nécessaires sur les livres afin que je les achète à Abidjan pour les expédier. Elle a eu pour réponse que si elle achetait les livres exigés en dehors de l'établissement, elle devrait elle-même venir en classe enseigner sa fille car aucun enseignant ne considérerait les livres achetés dehors. Ceci m'a amené à écrire ce coup de gueule. Comment est-ce possible ? Un livre acheté dehors n'est pas valable. Un cahier de musique acheté dehors n'est pas valable ! Simplement parce que le professeur le revend à l'élève avec un bénéfice compris entre 500 et 1000 FCFA. Allez-y comprendre quelque chose !

A notre temps, je dirais à votre temps madame la ministre, les choses ne fonctionnaient pas comme ça. Moi-même, très tôt orphelin, je n'ai jamais pu acheter un livre au collège. Pourtant j'étais major dans plusieurs disciplines. Les professeurs ne faisaient pas du livre une exigence. On avait les feuilles de copie pour nos compositions. Les exercices à faire au cours des devoirs ou interrogations ,étaient copiés au tableau et on composait sur les feuilles de copie.

Quelle est donc cette nouvelle race d'enseignants qui exigent tous les livres et mettent dehors tous ceux qui ne les achètent pas avec eux ? Est-ce là, la nouvelle politique ou l'orientation donnée à notre école ?

Mme la ministre, certains enseignants et responsables de l'école disent qu'ils font comme vous. Autant vous cherchez l'argent dans les poches des parents, autant ils en cherchent dans les poches des élèves pour arrondir leurs fins de mois.

Mme la ministre, je refuse d'y croire car je sais en âme et conscience qu'une telle position n'est pas partagée par vous. C'est pourquoi je vous exhorte à mettre fin à ce mercantilisme dans les établissements sous votre tutelle comme le collège moderne de Galébré. Il ne doit y avoir une école pour les pauvres et une autre pour les riches. C'est par la démocratisation de l'école (pour que les plus pauvres réussissent aussi) que beaucoup d'enfants de ce pays y compris vous ont pu se faire une place dans la société. L'on ne devrait inverser cette donne. Merci parce que vous me lirez et vous prendrez les décisions qui s'imposent et qui sauvent.

Respects distingués

Sylvain Débailly

Journaliste