Côte d'Ivoire (Affaire « Etudiants squatters des amphithéâtres»): « Pourquoi je ne suis pas d'accord avec Gbagbo » (Le Pr. Tano Yao)
« Comment Ouattara corrige les inégalités entre les fils et filles de ce pays »
Professeur titulaire (Cames) des Universités et secrétaire national des enseignants du supérieur Rhdp, Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix, Tano Yao apporte des éclairages sur l’affaire des étudiants squatters des amphithéâtres, après la sortie de Laurent Gbagbo, président du Ppa-ci, Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire. Ci-après sa contribution.
Je n’ai pas pour habitude de réagir aux sorties médiatiques des hommes et femmes politiques de notre pays, encore moins à celles d’un ancien Président de la République ; mais aujourd’hui, je dois faire exception parce que d’une part, je peux me considérer comme un sachant du système d’enseignement supérieur de notre pays, et d’autre part, parce que la critique nous semble inappropriée, voire déplacée.
De quoi s’agit-il ? Lors d’une visite à son village natal, le Président du Ppa-ci a donné sa position sur les étudiants qui squattent les amphithéâtres de l’Université de Cocody et a critiqué le pouvoir Rhdp sur cette situation et l’émergence à laquelle le gouvernement et les populations de Côte d’Ivoire aspirent.
Je comprends que de sa posture d’opposant, il formule des critiques tous azimuts, mais dans ce cas précis, il aurait pu/dû être mieux conseillé. En effet, on ne peut critiquer et s’attaquer à un phénomène sans évoquer et analyser son origine, sa source. Et dans le cas d’espèce, le président du Ppa-ci a été mal inspiré et devrait reconnaître sa part de responsabilité, très grande, dans les dysfonctionnements du système d’enseignement supérieur de notre pays.
« Je connais la gouvernance de tous les présidents… »
J’ai eu la chance de connaître la gouvernance de tous les Présidents de la République de Côte d’Ivoire depuis l’accession de notre pays à l’indépendance, par rapport à l’école en général, et l’enseignement supérieur en particulier. Pour ce dernier secteur, j’ai été un bénéficiaire en qualité d’étudiant, puis d’enseignant-chercheur (Assistant, Maître-Assistant, Maître de Conférences et Professeur titulaire). Je puis dire, sans aucune hésitation, car personne ne me dira le contraire, que depuis le Président Félix Houphouët-Boigny, seul le Président Alassane Ouattara a pris à bras le corps, les problèmes de l’enseignement supérieur en ajoutant une plus-value aux infrastructures construites par le premier Président de la République et en améliorant le cadre général de l’apprentissage dans ce secteur. Lorsque pendant l’équivalent de deux mandats présidentiels (2000 à 2010), aucune infrastructure notable d’enseignement supérieur n’a été construite sous sa gouvernance, le Président du Ppa-ci devrait avoir le triomphe modeste et la critique mesurée. En effet, c’est l’absence de prospective, pendant sa période de gouvernance justement, qui a engendré les grandes difficultés que le Rhdp s’attèle à corriger. Qu’est-ce que le Président du Ppa-ci peut revendiquer en matière de réalisation d’infrastructures dans le système d’enseignement supérieur ? Cette absence de prospective est d’autant plus surprenante que le premier gouvernement du Président Laurent Gbagbo de 2000 comptait onze ministres, enseignants de l’Université de Cocody.
« Le grand espoir des 1ers instants sous Gbagbo, s’est vite évaporé… »
Malheureusement, le grand espoir des premiers instants s’est vite évaporé pour nous, universitaires, car les changements qualitatifs annoncés ont vite été oubliés par ce gouvernement. En revanche, depuis son accession au pouvoir, le Président Alassane Ouattara s’attèle à une décentralisation d’envergure et à la création de nouvelles universités (Daloa, Korhogo, Université Virtuelle de Côte d’Ivoire, Man, San-Pedro, Bondoukou etc.). Par ailleurs, on note la construction de nouvelles cités universitaires (à Bouaké, Korhogo, Daloa, Man, San-Pedro). En plus, il y a la réhabilitation des anciennes cités universitaires construites avant 2000. Celles qui sont achevées sont mises à la disposition des étudiants au fur et à mesure. Tout cela, loin d’être exhaustif, est le résultat d’une bonne gestion (macro-économique aussi et surtout !) de la Côte d’Ivoire qui sortait de dix-sept années de gouvernance (1993 à 2010) pendant lesquelles l’exemplarité n’était pas la valeur la mieux partagée. Cela vaut aussi pour la ″sortie″ de l’ex-Première Dame, Madame Simone Gbagbo, mais je crois sincèrement qu’elle plaisantait, quand elle a lancé : « on ne mange pas la macro-économie » car une intellectuelle de sa carrure sait bien que c’est quand la macro-économie d’un État se porte bien, que des investissements pour le bien-être des populations peuvent être réalisées. C’était une parenthèse, soit dit en passant. Il y a beaucoup à dire, mais je terminerai par cette brève note en pointant la pleine responsabilité du Président du Ppa-ci et de ses lieutenants de la période de fin de règne du Président Félix Houphouët-Boigny, dans les difficultés de notre secteur de formation. En effet, pendant cette période et la décennie qui a suivi, ils ont soutenu sans réserve les comportements outrageants des apprenants envers l’Autorité et surtout leurs maîtres. Ce qui a eu et continue d’avoir des effets regrettables (c’est un euphémisme) sur l’Enseignement supérieur.
« Sous Gbagbo, les responsables de la Fesci étaient au 1er rang et ceux de l’Université aux 2e et 3e rangs »
Je rappellerai juste un exemple. Alors Président de la République, M. Gbagbo avait rendu une visite officielle à l’Université de Cocody, à l’invitation de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci). Sur le lieu de la cérémonie (esplanade de la Présidence de l’université), les responsables de la Fesci étaient installés au premier rang et ceux de l’université (Président, Vice-présidents, Doyens d’Ufr …) aux deuxième et troisième rangs. Quel égard voulez-vous que l’apprenant ait envers son Maître à partir de ce moment ? C’est vrai que tout n’est pas parfait dans notre pays, comme partout ailleurs dans le monde. Le Président de la République en est conscient et c’est pour corriger les inégalités entre les fils et les filles de ce pays qu’il a mis en place le Programme Social du Gouvernement (PS-Gouv) que son gouvernement implémente avec rigueur et acharnement, à la grande satisfaction des populations. Cette amélioration continue des conditions de vie des moins nantis de notre pays ne rend pas la tâche facile à une opposition en panne d’inspiration. C’est pourquoi, nous invitons le Président du Ppa-ci, avant de formuler des critiques, même dans sa posture d’opposant, à penser à son propre bilan, surtout qu’il a gouverné ce pays pendant une décennie. Et en matière de bilan, il est clair qu’il n’y a pas de débat, si on doit comparer le bilan sous sa gouvernance (2000 – 2010) et celui du Rhdp, sous la gouvernance de son Président dont les qualités managériales sont unanimement reconnues par les Ivoiriens et les institutions internationales. Ce bilan est si positif qu’il faudrait une série de publications pour rappeler ce que les Ivoiriens ont gagné depuis 2011. En réalité, les Ivoiriens, quel que soit leur bord politique, aspirent au bien-être sur cette terre de Côte d’Ivoire et le gouvernement y travaille. J’invite donc les hommes et les femmes politiques à éviter d’exploiter les difficultés de quelques franges de la population à des fins politiques, car le Peuple n’est, au fond, pas dupe.
Tano Yao
Professeur titulaire (Cames) des Universités
Secrétaire national des enseignants du Supérieur Rhdp